jeudi 25 septembre 2008

Si le sport pouvait conduire à la lecture ...


Ce serait ce qu'on appelle une bonne nouvelle !












Un pari auquel Geneviève Brisac a décidé d'atteler une poignée d'auteurs de son écurie qui lui ont livré cinq bonnes nouvelles :

1. Les pongistes ne sont pas des tendres. Leur pratique sportive exalte l'hyperagressivité. Inconciliable pour Colas Gutman qui a autant horreur de gagner que de perdre Une partie de ping-pong, à moins de se situer sur le plan de la création artistique.

2. Il vaut mieux être très grand si on vise le Haut-niveau, ce que démontre Xavier-Laurent Petit, un mordu de montagne qui est souvent parti loin et en altitude.

3. Une midinette est aussi légitime à se rêver écrivain comme Florence Seyvos, chanteuse de variétés ou vedette sportive, au moins quelques semaines, par exemple pendant tout L'été de Marie-Jo Perec.

4. L'ennui est salutaire. Il est même productif pour peu qu'on ait deux heures devant soi. C'est juste le temps nécessaire à Ellen Willer pour écrire une nouvelle, spécialité dans laquelle elle est Championne du monde.

5. Le sport est un des rares domaines où l'ado pourra dépasser ses parents (sans devoir attendre d'avoir atteint l'âge adulte). Une bonne idée que Valérie Zenatti a saisi comme on rattrape Une balle perdue.

Pour connaître l'issue de ces histoires il faudra déguster le recueil ...

On ne pourra plus dire ensuite que les adolescents qui aiment le sport détestent la lecture et que ceux qui dévorent les livres exècrent le sport. Comme si sport et littérature ne pouvaient pas être bons amis !

En écrivant un peu moins long pour être lu sans trop d'effort, et en variant les styles, le sport devient un thème susceptible de tenter les "petits lecteurs" sans rebuter les dévoreurs de pages puisque ceux-là aiment tout, dès qu'il s'agit de choses écrites.

On pourra faire remarquer aux élèves de cycle 3 combien le métier d'éditrice a des points communs avec celui de coach : les deux sélectionnent, encouragent, poussent leurs poulains à se dépasser, réduisent leurs résistances, les félicitent sans lénifier. L'écriture est un exercice qui demeure individuel tout en pouvant s'inscrire dans le collectif.

On pourra aussi les faire réfléchir sur quelques divergences ou points communs entre sport et littérature, dont voici quelques-unes, sans prétendre à l'exhaustivité :

* Une histoire est régie par un suspense comparable à celui qui rythme un match. Révéler la fin d'un livre peut tuer son intérêt comme proclamer le score final ôte toute envie de voir une compétition enregistrée en vidéo en votre absence .

* Le sport est un alibi pour parler d'autre chose.

* Les femmes ont investi la littérature avant le sport. C'est un acquis féminin du XX° siècle. La première femme à l'Académie française n'a tout de même été élue qu'en 1980 !

* La mixité n’est cependant pas encore entrée dans les mœurs sportives. Cette idée est sans doute insupportable dans un domaine où l’idée de participer sans esprit de compétition est inconcevable, n’en déplaise à monsieur Pierre de Coubertin.

* Le sport s’accompagne d’entraînement. Ecrire aussi.

* On ne gagne pas par hasard. On ne naît pas non plus écrivain.

* Le sport canapé se comparerait-il à la littérature de salon ?

* Le principe de base selon lequel il ne pourrait pas y avoir de progrès en l’absence de compétition peut être transféré à la littérature : concourir pousse l’écrivain à se surpasser.

* Geneviève Brisac regrette qu’on ne puisse exercer un sport avec désinvolture. Mais pourrait-on écrire en dilettance ? Dans un blog peut-être …

* S’il est vrai que le sport ne serait pas littéraire, est-on sûr que la littérature n’est qu’un travail intellectuel ? Il me semble que c’est parfois « sportif ».

On pourra enfin tenter l'aventure du passage à l'écriture sans craindre de placer la barre trop haut. Il est frappant d'écouter les témoignages récents d'adultes louant l'exercice de la rédaction imposée. C'est à l'école que Daniel Pennac, Anne Fine, et Ellen Willer ont acquis le goût de l'écriture. Certes les cours de français ne produiront pas que des écrivains, tout comme des gymnases des collèges ne sortiront pas que des médaillés olympiques mais l'essentiel n'est -il pas de commencer ?

mercredi 24 septembre 2008

NOUVELLES DE LA RENTREE

Pas un article depuis trois mois dans ces pages, ce qui ne signifie pas que je me sois arrêtée d'écrire. J'anime un autre blog où je publie presque un billet quotidien.

Les réformes scolaires, le manque d'intérêt de la "proche hiérarchie" à l'égard du travail dont je rendais compte, les déclarations fracassantes de plusieurs ministres (anciens ou en exercice) ont ralenti ma production en sapant mon enthousiasme. Dans la mesure où je ne poursuis pas l'expérience sous l'égide de l' Education nationale (en raison du manque d'intérêt susvisé) je ne vais pas passer des heures à retranscrire ce que je n'ai pas eu le temps d'achever de mettre au propre l'année dernière.

J'ai eu par contre beaucoup de contacts avec de jeunes enseignants qui étaient dans une forte attente. Ce serait donc dommage de rester bouche cousue. Pour eux et pour des lecteurs qui se promèneraient par hasard. Je procéderai néanmoins de manière "économique".

J'ai donc décidé (temporairement du moins) de reprendre ici les articles que je publie par ailleurs sur des sujets qui touchent à l'écriture, qu'il s'agisse de compte-rendus de lecture, de portraits d'écrivains ou de critiques de films autour du thème de l'école.

mercredi 25 juin 2008

DERNIERES NOUVELLES AVANT L'ETE

Les trois histoires ont été embellies grâce à une mise en page artistiquement ( et bénévolement) orchestrée par Ilya Green.
Elles sont en cours d'impression. Les élèves d'une classe pourront les emmener dans leur cartable en cette fin d'année scolaire.

Les autres enfants recevront le petit livret ... lorsqu'un second "mécène" aura accepté d'en prendre en charge la photocopie couleur. Si un lecteur a une suggestion à faire, elle sera la bienvenue, en commentaire ou par courrier électronique.

Je remercie tous ceux qui ont participé à cette aventure cette année de près ou de loin et je leur souhaite un bel été.

N'oubliez pas d'emmener de quoi écrire pendant les vacances....

Souvenez-vous du plaisir que vous avez à recevoir une simple petite carte !


lundi 12 mai 2008

TOUS LES CHATS SONT DANS LA NATURE

illustration reproduite avec l'autorisation d'Ilya Green

Ils étaient trois petits enfants qui s’en allaient à l’école en sautillant.

Le premier, le plus petit, habillé en vert et bleu, c’est un garçon. C’est Philippe. Il adore le bleu. Il propose de jouer à chat. A chat couleur. Bleu bien sûr. Ses camarades s’échappent. Philippe court. Quand il peut toucher l’un ou l’autre, il fait : "Toc ! Toc ! Toc !". La souris répond : "Qui est là ?" Le chat : "Le chat bleu ». Aussitôt la souris qui a été touchée doit toucher quelque part un objet ayant cette couleur (pas un des vêtements des souris, ce serait trop facile).

La seconde, c’est une fille. Comme elle est pas belle, elle s’appelle Emilie (sic). Elle a une besace qui pèse trop lourd pour elle. Elle porte des talons qu’elle les a piqués à sa maman. Elle adore jouer aux souris amoureuses : pour échapper au chat, les souris doivent se jeter dans les bras d'une autre souris. Tant qu'elles sont enlacées, on ne peut les toucher. Une souris touchée devient chat. Emilie se jette dans les bras de Philippe. Cà bloque le jeu.

Le troisième, le plus grand, il a joué à chat lui aussi. A chat glacé. La souris touchée par le chat reste là où elle a été touchée, comme une statue, jambes écartées. Les autres souris, pour la délivrer, doivent passer entre ses jambes. Le chat n'a pas le droit de toucher une souris quand elle passe entre des jambes. Les souris, elles, n'ont pas de camp. La partie prend fin quand toutes les souris sont touchées. Jouer à chat glacé, c’est formidable quand on est une bande de souris. A trois c’est différent. Devenu le chat, le chat glacé, il s’est figé et il a eu peur de fondre. C’est l’été, il fait chaud, il a très chaud.

Les trois enfants sont montés dans l’autobus pour continuer le trajet jusqu’à l’école. Ils étaient à fond dans leurs histoires de chat et de souris. Le grand, il est surnommé Sucette. Parce qu’il y a un grand S sur son maillot. Mais il croit qu’il est resté une souris. Il croit tout ce qu’on lui dit. Il a trop mangé de chips, en croyant que c’était du maïs. Il est devenu de plus en plus gros. Il est vraiment plus grand que les autres enfants du même âge. Il est gigantesque parce que ses parents sont très grands aussi. Il a de grands ongles aussi, qui sont bien utiles pour ouvrir les conserves avec.

Mais un jour, il a bu une potion vraiment magique. Depuis, il a les cheveux rouges. Il a un nez rouge. Il a la bouche blanche bordée de rouge. Il se sent différent des autres enfants. C’est pas facile l’école dans ces conditions. Les autres sont tristes pour lui.

Quand on est triste, faut faire rigoler les gens. Quand on a l’allure d’un clown, faut devenir clown. Sucette fait donc le clown. Il porte un slip à pois blancs . Il vit avec des puces. Il s’est rasé les bras et les jambes pour mieux les voir. Il n’a jamais de chaussures On vit très bien sans chaussures. Sucette n’en a plus besoin depuis qu’il les a perdues. Ou laissées à des souris qui dormaient dedans.

Mais son ours, c’est autre chose. Sucette a perdu un ours, un vrai, un vrai animal de cirque. Les autres enfants vont essayer de l’aider à le rechercher dans les bois. Voilà pourquoi ils sont dans cet autocar qui roule. Ou ce train. Ou cet avion qui laisse voir le ciel à travers les hublots.

Ils vont ensemble au pays des clowns, au cirque.

RECETTE DE REVE

illustration reproduite avec l'autorisation d'Ilya Green

Aujourd ‘hui est un anniversaire particulier. Alors la petite fille a besoin d’un gâteau très spécial.

Elle s’appelle Sophie. C’est sa maman qui fera le gâteau. Sophie avait supplié: fais-moi un gâteau s’il te plait pour ma copine (Caroline) partie dans la forêt. Elle avait voulu faire croire que Caroline s’était perdue dans la forêt. Qu’il fallait l’aider à revenir parce qu’elle risquait de rencontrer un animal sauvage, pourquoi pas même un tigre. On ne sait jamais quel danger courent les enfants.

La maman a souri. Oui, oui, je vais faire un gâteau …A quoi sera-t-il ce gâteau ?

Aux feuilles, elle a répondu Sophie. Comme si la maman allait préparer un gâteau aux feuilles !

Avec quelle recette ? 3 ou 4 œufs, du chocolat noir, une plaquette, 1 kilo de beurre, ou un gramme d’huile, de l’eau, 500 grammes, non 500 milligrammes, des pommes, du citron pour pas que çà noircisse, du rhum, de la farine, du sucre, du sucre vanillé, du sel, du lait, de la vanille, des fraises et de la menthe … Sophie a demandé aussi d’ajouter une bague comme elle l’avait lu dans une histoire célèbre.

Combien de temps de cuisson ? On le met dans le gaz. Pour une heure, 5 heures, 10 minutes, 24 heures, une nuit. Vous faites comme vous le sentez. On peut faire cuire jusqu’à 6 jours. Quand çà gonfle on arrête.

Sophie se charge du décor avec de la Chantilly pour faire des guirlandes de points blancs, et puis des feuilles bien vertes de cerisier, et quelques bonbons. Ou des boutons si vous n’avez pas autre chose. Sophie pose le gâteau sur une assiette avec des espèces de moitié de ronds roses parce qu’il fallait ajouter une autre couleur.

Après on emballe. Après on coupe.

Quel goût aura-t-il ? Un goût de vermifeuille (sic) bien sûr.

Qui va le manger ? Chut ! C’est tout le secret de la suite de l’histoire. Sophie ajoute une bougie. Une seule bougie.

Elle va s’habiller avant d’aller porter le gâteau. Une robe rose s’impose. Qu’y a t il sur la robe ? Des coquillages de sa mère, non de la mer. Des vagues, des écailles de dragon, un arc-en-ciel ? Ou des écailles de poisson. Elle a pêché un poisson et retiré ses écailles. La robe est en tissu d’écailles découpées sur un poisson.

La petite fille songe à la forêt où elle a recueilli hier un nouvel animal, un tigre blanc qu’elle a appelé Litchy. Elle achève de se faire belle. Elle accentue son petit nez, ses tâches de noirceur, ses yeux en amande. Elle remonte ses cheveux sous une cagoule. Elle ne voudrait pas se faire remarquer dans la forêt. Elle enfile ses sandales noires, sans talon, pour marcher sans bruit. Mais elle sera bientôt démasquée.

Elle entre maintenant dans la forêt en portant fièrement son gâteau à bout de bras. L’odeur du gâteau est entêtante. Le paysage se déforme. Les arbres sont noirs parce que c’est sombre, la forêt. Ou alors, sans s’en apercevoir, Sophie aura glissé de la forêt sur un dessin qui a été photocopié. Ce serait pour cela que les arbres et les tiges des herbes seraient noirs. Les arbres aussi parfois sont noirs parce qu’ils sont restés trop longtemps dans la nuit.

Quel est cet arbre ? Un cerisier. C’est la jungle. Des lianes peut-être …pour les écureuils. Mais pourquoi alors l’herbe est-elle rose ? Sophie a appris que quand on est amoureux on voit du rose partout. Elle aime le rose.

Elle est maintenant arrivée sous le grand arbre noir. Elle allume la flamme de la bougie qui oscille en lançant son rayon bleu. Quand le feu est très chaud il est toujours bleu.

L’effet est immédiat. Le tigre blanc surgit et s’aplatit aux pieds de Sophie. Les tigres sont comme çà. Ils ont peur du feu. Mais en voici un autre derrière qui n’est pas content parce qu’il voit que la bougie fond. Ce sera bête pour le gâteau. Ils ne vont pas manger le gâteau : ce n’est pas possible, les tigres sont carnivores.

Qui va le manger alors ? On va le couper en 2, ou en 3, pas en 4. Les tigres vont le couper avec leurs griffes. A cet instant elle devrait avoir peur. Peur d’être mangée par les tigres. Faudrait qu’ils soient méchants. Elle les trouve simplement tristes. Le second est plus triste que le premier. Celui-là ne pense qu’à manger le gâteau. Ils ne sont pas dangereux, ils sont sans griffes.

Sophie croyait avoir découvert un tigre unique. Ce sont deux tigres. Des frères jumeaux. Vous pourriez les appeler Madame Tigre et Monsieur Tigre. Et dire que c’est l’anniversaire des deux tigres. Ils pourraient avoir 10 ans. Malgré l’unique bougie. Le gâteau était trop petit pour en mettre deux, alors dix encore moins.

On va dire que les deux tigres ont un an. Une bougie, un gâteau, un an. A égalité. Des tigres jumelles. Avec des rayures qui ressemblent à des zèbres, sauf que les vrais tigres c’est en noir et orange. Les tigres se seraient-ils déguisés en zèbre ? Avec des oreilles en pointillés. Avec des poils plus courts. Des rides sur le front. Une raie au milieu. Et pas de moustache. Pas de griffes. Pas de queue.

Et si c’était pas un anniversaire ? Ce serait la fête des tigres-jumeaux.

Ou un autre anniversaire comme un anniversaire de mariage des deux tigres. Pour fêter le petit qui va arriver dans un mois. Non, dans neuf mois. Est-elle déjà enceinte ? Le petit c’est une graine d’herbe rose. Des confettis sont tombés sur l’herbe, la recouvrant de rose.

Que va-t-il ensuite se passer ? La petite fille donne le gâteau aux tigres. Un tigre est jaloux de l’autre. Il ne veut pas fêter son anniversaire. Sophie le regarde. Et le tigre la regarde aussi bizarrement. Soudain le grand tigre s’est enfui. Le petit a mangé le gâteau.

Il a mangé comme un cochon rose. Le tigre a apprécié. Une heure plus tard le tigre dort.

Sophie termine le gâteau. Son nez la chatouille. Parce que c’est un petit nez de tigre. La petite fille a le nez rouge. Elle saigne du nez. A voir les traits sur son nez on croirait qu’elle est maquillée en léopard. Elle sent ses oreilles se dresser sur sa tête. (en aparté : à la kermesse de l’école des mamans font des maquillages de chat comme çà)

Que va-t-elle faire ensuite ? Elle va repartir.

C’est la nuit. Ses parents vont s’inquiéter. La petite fille rentre chez elle.

Demain Sophie reviendra avec un gâteau plus gros.

dimanche 11 mai 2008

TREVE DE DINOSAURES


illustration reproduite avec l'autorisation d'Ilya Green

Elle s’appelle Elise. Elle a des cheveux noirs. Elle est née comme çà, avec des cheveux noirs.

Y’a des fleurs pour décorer les murs de sa chambre. Parce que c’est une princesse. Y’a aussi des fleurs sur son lit, sur la couverture. … Partout des fleurs. Et c’est joli comme un jardin.

Elise tremble. Elle a remonté la couverture pour ne pas sentir le froid malgré le pyjama de satin fleuri. Elle dort parce qu’elle est fatiguée, la tête posée sur un coussin pour que ce soit plus confortable.

Est-elle vraiment en train de dormir ? Non, pas vraiment. Elise voyage jusqu’au pays des rêves. Elle rêve tant que ses pensées s’échappent en longues branches qui se couvrent de feuilles.

Ses joues deviennent rouges. Elise a chaud maintenant.

Ses pensées se sont transformées. Elles ont galopé dans le pays des rêves. Elles ont rencontré des dinosaures qu’elles ont transformés.Regardez celui-ci qui est devenu rhinocéros. Et celui-là qui s’enfuit … Oh, le voilà scarabée. ! Le lézard court. Il essaie de rattraper le groupe.

La petite fille n’est plus une petite fille. Quelle taille fait-elle ? Immense. 50 mètres de long. Et le lit est un pays entier. Là cela devient une montagne. Les dinosaures courent sur la montagne. Certaines fleurs se sont rapprochées les unes des autres jusqu’à composer tout un champ, au-delà du jardin qu’on voyait tout à l’heure.

Le papier de la chambre est désormais le ciel. Et voici le soleil en train de se lever. Il est 10 heures du matin. Où vont-ils ? Où courent-ils ? Dans un pays où il y a davantage d’eau. S’ils courent c’est parce qu’ils ont soif. Et puis il est 3 heures, 4 heures, 8 heures, 14 heures 30. Ils se baladent toujours dans la chambre. Ils se promènent. Ils cherchent encore de l’eau.

Un téléphone sonne.Qui appelle au téléphone ? Une dame ou un monsieur. Ou le père d’Elise ...

Sa maman est entrée dans sa chambre. Elise se réveille très contente de son rêve. Elle a écrasé un arbre en dormant, ce qui explique le reflet qui s’est imprimé sur l’oreiller. Elle se regarde dans la glace. Des feuilles se sont déployées sur son visage comme un maquillage.

La maman crie. Les dinosaures s’avancent. Ce sont des bébés dinosaures. Ils viennent faire un bisou. Ils vont dormir maintenant. Elise se lève pour déjeuner. Pour faire sa toilette. Elle raconte tout à sa mère.

Quand elle remonte dans sa chambre pour s’habiller, Elise découvre sur son lit une branche sur laquelle des fleurs se sont épanouies. Un fruit s’entrouvre et s’en échappent quelques graines qu’Elise va glisser dans un petit trou, dans le jardin, et qu’elle va arroser de cinq gouttes d’eau.

samedi 10 mai 2008

ATELIERS D' ECRITURE

J'avais bien entendu adressé Catastrophe d'anniversaire à Ilya Green dont j'avais trouvé les coordonnées par Internet. Elle m'avait très vite répondu par un message d'encouragement qui m'invitait à poursuivre. Elle avait fait preuve d'une grande générosité en joignant trois superbes images qu'elle n'avait pas encore exploitées dans un livre.


J'ai évidemment tenu les élèves informés de cet épisode en leur apportant les images. Je leur ai proposé d'écrire une ou plusieurs histoires en rapport avec elles, leur promettant de continuer à faire le lien avec l'illustratrice. Ils étaient très enthousiastes. J'ai travaillé toujours seule avec eux, en demi-classe, en février et mars 2008, mais cette fois aussi bien avec les élèves d'Eric (qui avaient été à l'origine de Catastrophe) qu'ensuite avec ceux d'Isabelle (qui découvraient l'univers d'Ilya Green).

L'imaginaire tournant assez vite en rond, j'ai testé une nouvelle méthode.

Je suis partie de l'hypothèse qu'une histoire existait et que nous devions la (re)trouver, un peu comme si nous avions devant nous la dernière image d'un film dont le tournage venait d'être achevé. J'ai constitué à chaque séance deux groupes de 6 à 7 élèves, assis autour d'une table hexagonale, au milieu de laquelle se trouvait une des trois images et une seule. A la manière d'une enquête policière chaque élève était invité à poser une question à propos de l'image. Son voisin de gauche devait donner, de façon la plus spontanée possible, une réponse plausible.

Si j'ai adopté cette façon de questionner c'était
  • pour que chaque enfant s'exprime (il était obligatoire de répondre quelque chose, comme également de poser immédiatement une question à son voisin)
  • pour que chacun se sente libre et non jugé (cela allait trop vite pour qu'on dise c'est bien ou c'est bête)
  • pour qu'on soit à ce stade dans une profusion et qu'on ne se "contente" pas d'une idée donnée par quelqu'un et qu'on pousserait au bout
Le mot "plausible" est essentiel car je voulais obtenir un matériau abondant dans lequel il y aurait "forcément" des pépites que nous exploiterions ultérieurement. Mais le temps, comme souvent, a manqué pour parvenir à travailler ensemble.

J'ai tenu absolument à faire aboutir le projet, par respect pour les élèves, et parce que, même si les histoires n'étaient pas extraordinaires il valait mieux cela que rien du tout. Je prenais en note sur des feuilles de brouillon, in extenso, tout ce qui se disait (sans magnétophone) un peu comme on le fait en maternelle en dictée à l'adulte.

Je précise que j'ai bien essayé de les laisser écrire eux-mêmes (je ne pouvais pas matériellement me trouver au même moment aux deux tables pour copier tout ce qui se disait) mais le résultat, trop souvent illisible ainsi qu'on peut en juger sur l'exemple que j'ai scanné, m'a conduite à privilégier mes prises de notes. J'ai donc tout remis au propre, bout à bout, réordonné image par image, en intégrant ce qui était exploitable de leurs textes, en supprimant uniquement les doublons et en cherchant à tirer ce qui pouvait ressembler à un fil conducteur.

Le résultat aurait sans doute été "meilleur" si j'avais fait de larges coupes mais je n'ai pas "osé" retirer une idée plutôt qu'une autre puisque mon objectif principal n'est pas tant que l'histoire soit bonne (ce qui est forcément celui d'un auteur) mais que tous les enfants y trouvent leur compte (je dirais même leur conte). Mon objectif secondaire était de leur témoigner combien l'écriture est difficile en général et qu'il était donc normal que ce le soit pour eux (et pour moi), MAIS AUSSI qu'il ne faut pas s'arrêter parce que le chemin est dur, et que l'écriture apporte des satisfactions.

Je ne sais pas du tout si je recommencerai comme cela. Ces moments là furent en tout cas riches (et joyeux) avec ces élèves-là. J'ai bien entendu envoyé les histoires à Ilya Green qui les a appréciées et qui m'a autorisée à les mettre en ligne avec ses illustrations. Elle suggère plutôt ensuite de laisser les élèves rédiger leur propre histoire, en se servant des "matériaux" qui ont été révélés lors de la séances des questions...

Elle s'attache à la dimension poétique quelle qualifie de "vraiment très chouette..." Par contre son œil exercé juge la narration un peu distendue. D'un côté c'est un inconvénient, mais de l'autre ça laisse la place aux cheminements poétiques des enfants, qui est une piste intéressante bien qu'assez différente.

Elle a estimé que ça pourrait être bien de mettre en valeur cette forme un peu "déambulatoire" où on se laisse porter un peu comme dans la pensée au gré des idées, des questionnements, des impressions... Au cours d'une conversation téléphonique elle m'a interrogée sur mon intention de faire un petit livre ou quelque chose comme çà ... conseillant de jouer sur la typographie et les couleurs pour accentuer certains passages, et pour finalement accepter de s'en charger pourvu que nous ayons la patience d'attendre parce qu'elle est en train de finir son prochain livre. C'est une grande chance de pouvoir mener ainsi le projet vers un terme plus artistique et je pense qu'un tel petit livret constituera une précieuse motivation pour de futurs travaux d'écriture.

Dans cette attente, et pour lire les histoires dans leur version "simple", cliquez sur le titre souhaité :

Trêve de dinosaures

Recette de rêve

Tous les chats sont dans la nature