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lundi 24 mars 2008

POURQUOI EST-CE SI DIFFICILE D'ECRIRE ?

C'était les vacances. le moment idéal pour dégager du temps et faire avancer le dossier. Mais non. J'ai été victime du syndrome "Aujourd'hui peut-être, ou alors demain ..."

L'actualité pourtant m'a adressé plusieurs signes : le Scaphandre et le Papillon a obtenu un César et Renan Luce, chanteur de La Lettre deux Victoires de la Musique en catégorie Révélation. Des références qui figuraient dans la bibliographie d'Ecrire pour Dire et pour lesquelles voici les liens pour regarder les extraits des deux cérémonies :
Pendant ces vacances j'ai remis mes notes au propre mais je n'ai pas eu davantage de courage. Pourquoi l'avouer ? Mais parce que la difficulté à laquelle je me heurte me ramène au cœur de la problématique.

L'envoi d'une simple carte postale tourne à l'exploit.
En recevoir est un évènement.

J'avais cru que la carte postale électronique (lire l'article du 24 février dernier) doperait les énergies qui font défaut. Si cette bouteille à la mer est restée lettre morte c'est donc le bon moment pour récapituler les freins à l'écriture tels que je les avais communiqués au Salon de l'école:

1. Du côté de l'enseignant (car il faut bien d'abord se placer de son point de vue puisque à l'école c'est "théoriquement" lui qui décide des opérations)
      • le doute
      • le manque d'estime de soi : ai-je besoin moi-même de savoir (bien) écrire pour obtenir de bons résultats de mes élèves ? ... question que le professeur des écoles ne se pose jamais en sport ou en calcul mental ...
      • la crainte : pourvu que je ne fasse pas moi-même de fautes d'orthographe !
D'une façon générale il est difficile d'obtenir un écrit d'un enseignant (un projet, un bilan, un compte-rendu de conseil de cycle - une fiche de préparation ...) et ce n'est pas une question de bonne ou mauvaise volonté.

2. De l'élève
      • le lieu. Parce que vous pensez que c'est facile d'écrire dans le brouhaha d'une salle de classe, sous le regard de 30 autres personnes ? Marguerite Duras elle-même insiste sur cet aspect dans les premières pages d' Ecrire paru chez Gallimard, en1993: Cette maison, elle est devenue celle de l'écriture. Mes livres sortent de cette maison. De cette lumière aussi, du parc. De cette lumière réverbérée de l'étang. (...) J'avais enfin une maison où me cacher pour écrire des livres.
      • l'orthographe , surtout elle, mais aussi la grammaire et la syntaxe
      • un blocage inconscient face à l'écrit, qui réactive un épisode douloureux de l'histoire familiale (on s'en rend nettement compte dans La lettre déchirée, le roman d’Ella Balaert, Castor poche Flammarion, 1997, cité dans la bibliographie)
      • les remontrances, plus précisément l'accumulation des reproches formulés par les professeurs les années précédentes, comme nous en fait part Daniel Pennac dans Chagrin d'école, Gallimard, 2007
      • le jugement
      • l'absence de modèle familial : ne pas voir ses parents écrire, lesquels ne parviennent peut-être pas non plus à lire le français
      • a fortiori l'absence de modèle professoral : ne jamais voir la maîtresse écrire (si tout est préparé "en amont" sur ordinateur avec de belles typographies)
      • le pas envie
      • le pas le temps
      • le autre chose à faire
      • le rien à dire
      • l'angoisse de la page blanche, la difficulté à se lancer
      • les soucis d'outils, au sens large : quand papier, stylo ou ordinateur font défaut
      • les lignes de copie, de punition trop souvent données
      • l'association systématique "écrit = devoirs"
Ce répertoire n'est pas exhaustif et sera enrichi au mois de juin 2008 lorsque le temps sera venu de faire un bilan de la recherche entreprise cette année.

Nous verrons aussi dans un autre chapitre qu'il existe des motivations sur lesquelles on peut s'appuyer pour contrebalancer les freins.

mercredi 20 février 2008

ECRIRE POUR DIRE, pourquoi avoir choisi cet intitulé ?

En choisissant la dénomination Ecrire pour Dire pour désigner l’atelier j’ai probablement été plus ou moins inconsciemment influencée par des livres que j’avais lus, ou des chansons qui m’avaient touchées (par exemple Les mots pour le dire de Marie Cardinal, chez Grasset 1975, l’album Mots pour Maux de Johnny Hallyday, nos Maux d’amour de Michel Polnaref (compilation des titres de 1966-1972 sortie en 1999).

C’est comme pour le choix d’un prénom. On croit être original en appelant son enfant si c’est une fille Léa, Manon ou Chloé ou si c’est un garçon Enzo, Lucas ou Théo pour s’apercevoir que ce sont les prénoms les plus attribués actuellement.

Ecrire pour Dire, trois petits mots qui composent une allitération dynamique (figure de style dans laquelle un son consonantique est répété dans plusieurs mots proches, comme Les chaussettes de l'archiduchesse sont-elles sèches ou archi sèches ?, ou en publicité Du beau, du bon, Dubonnet, ou des noms de marques Coca-Cola, Big Ben, Mickey Mouse …) pour signifier que lorsque la parole est impossible ou trop difficile, c’est l’écriture qui permettra de véhiculer le message.

C’est précisément quand c’est difficile que le recours à l’écrit est le plus nécessaire, et seul capable d’apporter une vraie valeur libératoire, cathartique.

J’aurais pu choisir Ecrire pour communiquer, Ecrire pour transmettre, c’était un peu lourd. Ecrire pour dire s’est insinué sous ma plume comme trois petites notes de musique en contrepoint de l’expression populaire Parler pour ne rien dire.

Un clin d’œil pour souligner qu’il n’allait pas être question d’écrire dans le vide mais bien pour porter un message. Le délai était court pour envoyer mon texte au CDDP. C’est parti comme cela. Et la lecture de multiples articles de spécialistes est venue conforter mon choix … jusqu’à ce que je lise l’affirmation apparemment contradictoire dans un texte d’Evelyne Charmeux intitulé dans la rubrique Apprendre à écrire / Pour une pédagogie efficace de la production d’écrits (voir http://www.charmeux.fr/ecritpeda.html) trouvé sur son site http://www.charmeux.fr/ où elle s’insurge contre l’exercice de la rédaction en certifiant que on n’écrit pas pour DIRE, mais toujours pour AGIR sur celui avec qui on communique.

C’est un article de fond auquel je souscris totalement. Elle formalise, mieux que je ne pourrais le faire une réflexion très fine sur la production d’écrits. Elle met en avant le fait qu’on n’écrit pas pour dire, au sens de parler, bavarder. Elle insiste sur la fonction de l’écrit qui n’a de sens que si on cherche à communiquer « pour de vrai », en plaçant les élèves dans des situations réelles de communication, ce qui est rarement le contexte de la rédaction ou du texte dit libre et jamais avec un travail de copie ou de dictée.

Je souscris totalement à cette opinion. Nous sommes d’accord sur le fait qu’on n’écrit pas « en l’air ». Et nous sommes là pour prouver aujourd’hui que dès lors qu’on place les élèves dans de telles situations cela marche. Même si les résultats sont modestes.

Bien sûr qu’on n’écrit pas comme on parle. Il n’y a aucun conflit de mots donc entre Evelyne Charmeux et moi. Elle m'a donné l'autorisation de faire référence à ses écrits très vite et fort aimablement Je ne peux donc que vous inviter à la lire dans le texte en suivant les liens ci-dessus.

La découverte du site d'Evelyne Charmeux peut se prolonger sur son blog, qui derrière l'intitulé le blog de l'amie scolaire, cache des articles écrits comme autant de coups de coeur ou de griffe, comme par exemple celui-ci qu'elle vient de m'adresser à propos de la réforme annoncée de la grammaire: Jargon et grammaire, ou quand celui qui jargonne n'est pas vraiment celui qu'on pense...


LA GENESE DU PROJET


Présentation de l’Atelier devant les participants au Salon de l’école, le mercredi 30 janvier 2008

Tout a commencé ici, à Antony, au cours d’un stage auquel je n’aurais jamais du participer, mais

  • Il y avait eu appel de candidatures pour le « sauver »
  • C’était le seul auquel je pouvais prétendre en terme de dates puisque j’étais alors déchargée par une PE2 en stage filé qui ferait parallèlement son stage en responsabilité à même période
  • J’avais mal lu le libellé
  • J’étais donc inscrite un peu par erreur (cela concernait l’écrit en cycle 3)
  • Il y avait des temps morts comme cela arrive parfois…

Par contre

  • Il y avait une excellente ambiance
  • Je n’étais pas un cas isolé. Nous étions nombreuses « égarées »
  • Je me suis aperçue que l’expérience de la maternelle était transposable au cycle 3
  • On guettait les résultats du « mouvement » et j’ai eu connaissance de ma nomination dans une nouvelle école à la rentrée 07/08
  • J’ai appris que le prochain Salon serait consacré à l’écriture
  • Je regrettais de ne pas avoir osé participer il y a six ans quand j’avais été sollicitée par un professeur de français pour présenter une recherche sur l’utilisation de l’album au cycle 3. (à cette époque je ne me sentais pas du tout de taille à pouvoir me présenter devant des collègues)
  • Je me sentais davantage prête même si cela m’affolait un peu
  • Je venais de renoncer à m’engager dans le processus du CAFIPEMPF mais je conservais l’envie de faire une recherche
  • Marie-Noëlle Rolland, Commissaire du Salon et professeur à l‘iufm de Versailles, me faisait confiance
  • J’ai monté un dossier et demandé un stage filé pour mener la recherche sans empiéter sur mon temps de décharge. Mes deux inspectrices (de ma circonscription d’alors et de la future) ont donné leur aval.
  • J’avais un accord de principe de l’équipe d’une école où j’avais enseigné quatre ans auparavant.

J’ai eu la réponse de l’inspection académique en septembre. Isabelle, ancienne collègue, m’a dit « banco » la première. Eric nous a vite rejointes dans l’aventure. Nous avons avancé pas à pas.

Nous ne pensions pas être dans une totale innovation. Mais nous avions envie toutes les deux de retravailler ensemble. C’est souvent le cas quand deux classes se lancent dans de la correspondance. J’ai recueilli de multiples expériences qui se sont construites sur cette base.

Il y avait deux originalités, dont une ne pourrait pas se répéter une année suivante :

- l’idée était de faire une correspondance entre deux écoles et non entre deux classes

- de correspondre avec en particulier des élèves dont j’avais été la maîtresse de maternelle

Le projet s’inscrivait dans une réflexion sur la continuité maternelle/élémentaire, bien élargie par rapport à la liaison GS/CP.

Le but de la recherche était d’explorer les freins et motivations à l’écriture (au sens de production d’écrit) et d’étudier s’il existait un lien entre des difficultés d’apprentissage constatées en cycle 3 et une amnésie pédagogique puisqu’en fin de maternelle les élèves font majoritairement preuve de compétences acquises dans le domaine.

Pourquoi ces compétences se perdraient-elles ensuite en route ? Les blocages sont-ils du côté de l’élève, de l’enseignant, du cadre, ou y a t il un peu de tout cela et d’autre chose encore ? Nous savions que nous n’allions pas révolutionner l’enseignement de la production d’écrits. Nous sommes trop respectueux du travail mené avant nous par célestin Freinet, le groupe d’Ecouen ou par Mireille Brigaudiot.

Nous voulions « apprendre à faire tout seuls » comme le disait si bien Maria Montessori et très franchement je remercie l’institution de m’avoir permis de le faire, même si je n’ai en réalité pas vraiment profité du temps offert par le stage filé. Nous avons vécu des émotions assez fortes qui nous ont donné envie de continuer et même de prolonger une seconde année si c’est possible.

Evidemment nous avons rencontré quantité de problèmes :

  1. La question de l’emploi du temps puisque Isabelle est en stage filé le même jour que moi, à savoir le mardi, et avec obligation d’aller à Boulogne ces jours-là. Je n’allais évidemment pas mener la recherche avec la PE 2 de sa classe
  2. Etant déchargée 3 jours par semaine, et ayant une PE2 dans ma classe le 4ème, je pouvais « techniquement » organiser mon emploi du temps pour me dégager un autre jour … sauf que l’école dont je suis directrice est tellement lourde à gérer que je me culpabilisais de m’absenter. Si bien que je n’ai réussi à la quitter que sur 3 demi-journées seulement entre septembre et fin janvier. Heureusement que le sujet était la correspondance !
  3. Nous avons subi des pannes informatiques, des problèmes de transmission de données. Là encore on a été aidées du fait qu’une des enseignantes de mon école a un enfant scolarisé dans l’autre. Elle a joué le facteur pour gagner du temps.
  4. Les stages filés sont interrompus 3 semaines pendant les stages de responsabilité, et sans remplacement cette année. Je suis donc bloquée dans mon école depuis avant Noël. Et plus encore puisque j’ai du remplacer la PE 2 et prendre une classe que je connaissais mal. Et encore davantage puisque je suis en cours d’inspection. Si bien que même hier, alors que le stage filé reprenait je n’ai pas pu me consacrer à l’intervention de ce matin et revoir Isabelle.
  5. Finalement ce sont deux enseignants (deux classes) de mon ancienne école qui se sont investis. Aucune de ma propre école. D’abord parce que les enseignantes « attendaient » de recevoir du courrier pour en renvoyer. Ensuite parce qu’il y a un taux de rotation hors normes qui complique beaucoup la continuité des apprentissages et des projets. Nul n’est prophète en son pays …
  6. Parce que aussi il y a beaucoup (beaucoup trop ?) de projets à mener de front : Les sorties régulières en médiathèque, ludothèque, centre culturel
    Les spectacles au théâtre municipal
    Les sorties en forêt, une par saison
    Le prix littéraire et la fête de la lecture
    Ecole et cinéma
    Lire et faire lire
    Sans compter la piscine au troisième trimestre
  7. La date du Salon de l’école (30 janvier) arrive très tôt dans l’année scolaire et nous n’avons pas fini l’expérimentation. Mais se heurter au principe de réalité n’est pas une surprise en soi pour des enseignants ...

Par hypothèse nous nous étions refusés à anticiper des résultats. Donc nous n’avions pas d’outils d’évaluation. Si on regarde la quantité produite on a de quoi être déjà satisfaits.

Si on mesure l’investissement des élèves aussi. Ainsi, tous les élèves ont participé, et ils en redemandent …


samedi 9 février 2008

A QUI LA FAUTE ?

Redresse-toi ! Tiens-toi droit ! Tu vas devenir bossue !

Rester dans le droit chemin est l’obsession des éducateurs … comme l’orthographe (étymologiquement « écrire droit ») est celle des professeurs de français.

Pendant des années la dictée était ma hantise. Je savais que quels que soient mes efforts et ma concentration j’aurais un zéro pointé. Chaque faute coûtant alors 4 points la cinquième devenait forcément fatale.

Je me souviens particulièrement d’un texte où il était question d’un raid. Mais l’auteur employait le mot « bivouac » dont j’avais deviné le sens mais pas l’orthographe. Les héros bivouaquaient de campement en campement. Il s’agissait donc sans équivoque possible d’un « bivouaque ». Quelle honte le jour de la correction ! Ce mot ne m’a jamais été d’aucune utilité … jusqu’à aujourd’hui, pour vous faire sourire.

L’orthographe est –selon beaucoup de mes collègues- la raison majeure du dégoût pour l’écriture. Quel dommage ! On recommande désormais de distinguer le moment où on évalue l’orthographe de celui où on note la qualité de la production écrite mais cela demeure un frein important. Parfois à juste titre parce que certains travaux d’élèves s’apparentent au rébus tellement ils sont écrits de manière phonétique, et encore…

J’ai rejoint l’iufm en 2000.L’iufm c’est l’Institut de Formation des Maîtres qui forme, comme son nom ne l’indique pas tout à fait, des professeurs des écoles qu’on appellera toujours « instit » mais là n’est pas la question. J’y ai appris qu’on ne devait plus, sous peine de traumatiser l’élève (dit « apprenant ») pointer des fautes d’orthographes mais des erreurs orthographiques.

Très franchement il est difficile d’employer cette longue expression que nombre d’élèves ne comprennent d’ailleurs pas. J’avais demandé à un petit garçon de 8 ans quelle différence il faisait entre faute et erreur. Il m’avait donné une réponse à méditer.

C’est facile : la faute c’est quand la maîtresse me dit que je me suis trompé, l’erreur c’est quand je le vois tout seul.

L’orthographe est en évolution constante, ce qui ne facilite pas les choses.

A vous maintenant de « voir » si j’ai fait des erreurs dans la phrase suivante :

Il parait que si je pars en weekend à moindre cout pour mon portemonnaie je risque de provoquer une pagaille ambigüe !

Je n’ai fait aucune erreur. Comme vous pouvez vous en assurer à http://www.orthographe-recommandee.info en consultant un site qui vous présentera les rectifications de l'orthographe française. Soyez rassurés. Celles-ci sont officiellement recommandées, sans toutefois être imposées. Je peux donc aussi bien écrire qu’il paraît que si je pars en week-end à moindre coût pour mon porte-monnaie je risque de provoquer une pagaïe ambiguë !

Pour en savoir davantage, téléchargez le mini-guide.
http://www.orthographe-recommandee.info/miniguide.pdf

Il va falloir désapprendre pour continuer à enseigner ...

Merci à http://ebookenherbe.free.fr/accueil/index.html où j’ai trouvé ces liens. Je vous invite à aller y jeter un œil, notamment à la rubrique « le coin des enseignants » qui vous sera ouvert très vite après avoir rempli une demande de mot de passe.

alors COUPABLE ?

Le Cercle rouge (de Jean-Pierre Melville, sorti en 1970) est le dernier film que tourna Bourvil. Il y interprète le commissaire Mattei, un personnage au cœur pur qui reçoit comme un uppercut à la toute fin du film la confidence du juge d’instruction :
« Tous coupables, Mattei, tous coupables ! », une critique sans appel sur l’âme humaine.

A l’instar de ces protagonistes, serions-nous tous coupables au regard de l’orthographe ?

Mea Culpa

C'est ma faute
C'est ma faute
C'est ma très grande faute d'orthographe
Voilà comment j'écris
Giraffe
             Jacques Prévert
Ce poème assez connu de Jacques Prévert est en réalité la première strophe
d’un texte plus long qui s’intitule

Sans faute (codicille)

J’ai eu tort d’avoir écrit cela autrefois
Je n’avais pas à me culpabiliser
Je n’avais fait aucune phaute d'orthografe
J’avais simplement écris giraffe en anglais.
Bien entendu, vous aurez compris que le poète a inversé ph et f
pour provoquer deux erreurs là où on ne les attendait pas.
Voilà deux poèmes que l'on peut utiliser dès que les élèves savent lire
et s'ils ont assez de maturité pour en apprécier l'humour.

dimanche 13 janvier 2008

Une lettre à lire entre les lignes


C’est une lettre authentique, écrite d’une main ferme, avec élégance.

Admirez-en la calligraphie généreuse.

Appréciez la politesse de la formulation.

Sens, le 7 mai 1919.

Monsieur Breuillé,

En réponse à votre courrier, je ne puis en ce moment donner une suite favorable à votre demande ; car j’attends M. F…et mon fils aîné comme voyageurs de telle sorte que tout le personnel extérieur va se trouver absolument au complet.

Je ne puis que vous souhaiter de trouver un emploi favorable. Je le fais de bon cœur en souvenir de la période où vous avez été à ma maison et je vous prie d’agréer mes meilleures civilités.

Léon F.

Cette lettre est une réponse.

Une fin de non-recevoir à un homme encore jeune (il a 27 ans) qui revient de guerre et qui a tout simplement demandé à reprendre sa place dans la société où il avait travaillé.

Cette lettre est un rejet.

Le renvoi du sergent qui a été gazé dans les tranchées de la bataille de Verdun. Pour défendre son pays, sa patrie, son honneur. Pour permettre à son ancien patron de conserver sa position sociale et de continuer à faire prospérer son commerce.

Qui va à la chasse perd sa place ….

Cette lettre était destinée à mon grand-père. Il ne l’a jamais évoquée. Il ne parlait jamais de la guerre. Il avait refusé la médaille militaire. Il pensait juste avoir mérité de reprendre le cours de sa vie antérieure.

Cette lettre m’est parvenue aujourd’hui par Internet, postée par mon père, qui n’accepte toujours pas l’affront subi par un homme dont la conduite avait été si exemplaire.

Des milliers d’autres français ont sans doute reçu de tels courriers.

Cette lettre est une cicatrice qui ne s’efface pas.

Comment faciliter l'écriture ?


Quelle situation proposer à des élèves pour leur faciliter l’écriture ?

Au lieu d’une rédaction sur un sujet fictif (lire ici http://www.charmeux.fr/ecrire.html ) pourquoi ne pas entamer une correspondance avec des personnes réelles et connues ou faciles à rencontrer ? En l’occurrence entre des écoles proches géographiquement mais différentes en termes de population et de niveau de classe.


Cette réponse qui semblait toute simple s’est révélée complexe dans sa mise en œuvre. Parce que c’était méconnaître toutes les implications sous-jacentes à l’acte d’écrire. Mais ce fut aussi le moyen de les mettre à jour puisque en fait le but de la recherche était surtout d’explorer les freins et les motivations à écrire dans un cadre scolaire.


Ecrire une lettre n’est pas du tout facile.

Sans doute parce que dans notre inconscient collectif se sont imprimées un grand nombre de lettres douloureuses : la lettre anonyme d’un corbeau malveillant, l’avis d’imposition, la lettre de dénonciation en temps de guerre, la lettre de licenciement, le faire-part de décès.

Tels étaient les termes du début de l’intervention que j’avais rédigé pour le Salon de l’école quand j’ai reçu par Internet une bien curieuse lettre : voir "Lire entre les lignes"